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De nature répressive, opaque et autoritaire, la gouvernance d’entreprise se métamorphose pour devenir source de création de valeur, d’autonomie et de sérénité.
Finalement, la gouvernance ne pourrait-elle pas se résumer à « faire ensemble » ?
Faire ensemble, voilà deux mots qui veulent en dire beaucoup. Penser et organiser dans la durée ce « faire ensemble » est un élément clé de la gouvernance afin de se donner les moyens de réussir.
Et réussir collectivement.
En l’absence d’une hiérarchie rigide et stricte, comment se prennent les décisions ?
Est-ce que n’importe qui peut décider de n’importe quoi ?
Ne serait-ce pas une très bonne manière d’aller droit dans le mur ?
Tentons de répondre à ces questions en prenant pour exemple, nous, FlexJob et notre mode de fonctionnement autogouverné.
Qu’est-ce que la gouvernance d’entreprise ?
Tout d’abord, les bases.
Le concept de gouvernance cherche à répondre à l’éternelle question de la prise de décision efficace au sein des organisations. Il s’agit de l’ensemble des processus décisionnels qui permettent de transformer le foisonnement d’intérêts divergents en une action collective concertée.
En résumé, la gouvernance est définie comme : l’action de gouverner, la manière de gérer et d’administrer.
Cette notion de gouvernance d’entreprise est souvent associée aux grandes entreprises. En réalité, la gouvernance concerne chaque entité, quelle que soit sa taille, ou son secteur d’activité.
Auparavant, l’exercice du pouvoir était autoritaire et plus ou moins opaque avec de nombreuses informations importantes dissimulées par les dirigeants.
C’est à la suite de plusieurs scandales comme celui de Vivendi Universal (des actionnaires américains de Vivendi Universal ont engagé une action en justice contre le groupe de médias et de communication et son ex-PDG Jean-Marie Messier, les accusant de les avoir induits en erreur à propos de la situation financière du groupe) que l’origine de la gouvernance d’entreprise est née.
Un besoin d’équilibre entre tous les acteurs d’une entreprise, les parties prenantes (actionnaires, clients, fournisseurs, collaborateurs, etc.), et de beaucoup plus de transparence quant aux orientations de l’entreprise.
Transparence, processus décisionnel réparti entre les différentes parties prenantes et mise en place d’un système pour évaluer la performance de l’entreprise sont les principes fondamentaux d’une bonne gouvernance d’entreprise.
De nature économique en premier lieu, cette gouvernance est très souvent associée au développement durable qui repose sur 3 grands piliers :
- Un développement économique viable ;
- Un développement social équitable ;
- Un développement écologique durable.
Pourquoi avons-nous choisi le système d’une gouvernance partagée ?
C’est tout naturellement que nous avons décidé de choisir le système d’une gouvernance partagée afin de :
- Permettre à chacun d’être acteur du pilotage stratégique et opérationnel de notre organisation.
- Gagner du temps et diminuer la charge mentale en définissant un mode décisionnel adapté aux différents niveaux d’enjeux.
- Développer l’autonomie et la responsabilisation de chacun en définissant qui est responsable de prendre des décisions sur quoi.
- Apporter de la sérénité au collectif en homogénéisant et clarifiant notre fonctionnement interne.
- Expérimenter des modèles innovants, et ainsi être à l’aise chez nous et chez nos clients.
Comme avec nos clients, l’instauration de ce système de gouvernance a nécessité une vraie méthodologie afin de fixer des règles et un cadre commun en fonction du type de décision à prendre.
La gouvernance des organisations nécessite de plus en plus, à l’image de l’environnement des organisations, d’être pluraliste.
La gouvernance partagée permet de constituer un ensemble cohérent de sous-systèmes en interaction entre eux, organisés de manière souple. L’enjeu pour les acteurs économiques est de rester ouvert sur l’extérieur, réactif, attractif et innovant.
Une gouvernance partagée peut être un facteur de bien-être des salariés et être source de motivation et d’implication. Elle permet de mieux résister aux crises et aux multiples changements qui sont aujourd’hui imposés par notre environnement.
Une fois le processus enclenché, il devient un vecteur de performance presque inépuisable pour l’entreprise.
Gouvernance partagée : les prises de décisions chez FlexJob
Au sein de FlexJob, une équipe projet a été mise en place pour travailler sur le sujet pour ensuite proposer et faire challenger par le collectif une proposition de système de prise de décision simple et souple au service d’une gouvernance partagée, sur lequel s’appuyer pour faciliter toute prise de décision au sein de notre collectif.
Où l’art d’expliciter l’implicite sur la thématique de la gouvernance.
Éloge de la confiance et du bon sens
Chez FlexJob, la confiance prend une place très importante dans notre fonctionnement.
Il est de la responsabilité de chacun de s’assurer que ses actions et ses décisions concordent avec les principes et la philosophie de FlexJob, ou d’aborder en collectif des points avec lesquels il serait en désaccord.
Pour chaque prise de décision, à chacun de fonctionner avec bon sens, authenticité et intelligence pour prendre de bonnes décisions et ainsi assurer la réussite du collectif.
Prendre une décision requiert d’avoir les informations et les compétences nécessaires. Il s’agit également d’anticiper son impact (temps et euros) ainsi que de transmettre son verdict aux bonnes personnes.
Confiance, intelligence collective, humilité, empathie, bienveillance… La mise en place d’une gouvernance partagée repose sur des principes et des valeurs fortes.
Une gouvernance partagée c’est une gouvernance qui permet à chacun d’être acteur du pilotage stratégique et opérationnel de l’organisation.
Pour nous, cette démarche a aussi permis d’apporter de la sérénité au collectif en homogénéisant et clarifiant l’implicite de notre fonctionnement. Le tout dans une logique d’autonomie et de responsabilisation de chacun.
Et surtout, l’instauration d’une gouvernance partagée au cœur de FlexJob nous permet de tester en interne des manières de fonctionner innovantes et collaboratives.
La culture de l’entreprise autogouvernée suppose néanmoins que les personnes aient les compétences et les processus nécessaires pour régler leurs désaccords avec maturité et intelligence.
Les décisions individuelles
Une personne seule prend sa décision avec les éléments qu’elle détient pour répondre au mieux, selon elle, à ses objectifs et besoins.
Elle a néanmoins un devoir d’informer les personnes impactées en se posant la question suivante : l’information est-elle utile pour d’autres ?
📚 Les sujets concernés :
- L’ensemble des questions relatives à l’organisation de son temps personnel : télétravail, horaires de travail, déplacements, etc. ;
- Les problématiques engageant un moindre budget (inférieur à 50 €) ;
- La gestion des activités opérationnelles courantes : relations commerciales, ateliers, animations, entretiens de recrutement, etc.
- La gestion de projets à faible enjeu (selon toujours le bon sens) : construction de l’offre, relation client, etc.
🤝 Le processus : toute prise de décision individuelle qui a une incidence sur l’équipe ou l’entreprise doit être communiquée à toutes les personnes impactées au moins 12h avant son application (dans la mesure du possible).
La sollicitation d’avis
La personne sollicite l’avis d’au moins deux autres personnes qualifiées et/ou impactées puis prend sa décision seule.
📚 Les sujets concernés :
- Les questions relatives à un budget moyen (entre 50€/an et 300€/an) ;
- La gestion de la performance : fixer les objectifs, les priorités et le processus de suivi ;
- La gestion de projet à fort enjeu (selon le bon sens) : construction d’offre, relation client, etc. ;
- La stratégie liée à l’une des activités : stratégie de communication, développement d’un nouveau service/produit, stratégie de vente (prix) ;
- Les congés (demande en amont aux personnes impactées + information à tous par invitation mail).
🤝 Le processus :
- Choisir les personnes les plus compétentes pour répondre à ma sollicitation d’avis (si la décision est importante, il est recommandé de consulter plus de personnes).
- Réaliser la sollicitation :
- Différents modes de sollicitation possibles (slack/mails/questionnaires/etc.)
- Pour toutes questions jugées importantes, il est recommandé de formuler sa sollicitation à l’écrit et de laisser du temps aux personnes pour réfléchir et exprimer leur réponse à froid.
- Transmettre à toutes les personnes impactées ma décision, le plus à l’avance possible.
La décision par délégation ou majorité au 2/3
Chaque personne doit être informée des enjeux de la réflexion en cours et de la décision qui doit être prise. Les personnes peuvent ensuite déléguer leur “voix” à un groupe de personnes qui porteront le sujet à leur place.
📚 Les sujets concernés par “la majorité” :
- Questions liées à des budgets importants (+ de 300€/an ou + de 2 jours) ;
- Modification du fonctionnement de l’organisation, du cadre collectif : règles collectives (exemples : horaires flexibles, journée en télétravail), modes de gouvernance, architecture des réunions …
- Stratégie de l’entreprise : stratégie d’investissement, de croissance (interne, externe), d’implantation géographique, de lancement de nouvelles activités, etc.
- Recrutement
Dans le cas de la majorité aux deux tiers, chaque personne est invitée à donner son opinion. La décision est ensuite prise si deux tiers des votes sont en accord avec la décision.
Une pondération peut être construite pour augmenter le poids des personnes les plus qualifiées pour prendre des décisions spécifiques.
On parlera alors d’une décision par délégation qui intervient quand un collaborateur délègue son vote à quelqu’un qui le portera à sa place.
Objection votre honneur !
Toute personne peut bloquer, seule, toute décision en opposant un veto.
Ce veto ou objection doit être justifié et accompagné d’une contre-proposition. Le veto doit être également communiqué à l’ensemble des collaborateurs.
Tous les types de décisions sont concernés par le veto.
🤝 Le processus :
- Lorsqu’une décision est prise, une personne peut la bloquer par l’expression d’une objection justifiée et contre-proposée.
- Le veto doit être présenté à l’ensemble de FlexJob.
- Le processus concernant cette décision remonte alors d’un “niveau” : si cela concerne une décision individuelle, on passe à de la sollicitation d’avis ; si c’est de la sollicitation d’avis, on passe à la majorité aux deux tiers.
Entreprise libérée, entreprise responsabilisante, sociocratie, holacratie, gouvernance partagée… Tous ces nouveaux modèles ne témoignent que d’une seule et même volonté, (re)donner du sens au travail.
Comment installer une gouvernance partagée ?
Installer une gouvernance partagée ne veut pas dire faire table rase du passé. Cela ne sous-entend pas non plus qu’il n’y a plus de dirigeant ou de manager.
Cela induit néanmoins que l’approche managériale sera participative afin d’intégrer largement les acteurs de l’organisation dans les prises de décision. Il s’agit d’associer les personnes concernées par les sujets traités au processus de décision.
Le dirigeant ou le manager s’il reste « le décideur final », notamment en cas d’impasse, doit aujourd’hui avoir les compétences d’un « animateur » afin d’organiser la prise de décision collective.
Son rôle est de communiquer et de rassembler ses équipes dans un sens commun, d’insuffler cohérence et motivation.
Bien qu’installer une gouvernance partagée ne remette pas en cause la logique hiérarchique ni le statut du dirigeant ou des managers, mais bien leur rôle, elle implique un changement conceptuel exigeant qui peut constituer une perspective déstabilisante.
Par exemple, la gouvernance partagée implique :
- Que les salariés aient un niveau d’informations suffisant et les compétences nécessaires pour statuer sur le sujet à traiter ;
- De créer des espaces de discussion entre les acteurs de l’entreprise pour prendre en considération des différents points de vue en présence ;
- De clarifier les différents niveaux de prises de décision et la responsabilité nouvelle que cela implique pour chacun.
Ainsi notre recommandation est de mener des expérimentations de prise de décision partagée sur des sujets concrets afin de progressivement déployer les savoir-faire nécessaires à ce type de gouvernance.
Il s’agirait par exemple d’aider les managers à organiser des groupes de travail pour demander à leurs collaborateurs de proposer une décision.
Chacun peut ainsi constater les tenants et les aboutissants de cette nouvelle conception du management et poursuivre progressivement le déploiement d’une culture nouvelle dans l’organisation.
Nous avons décrit cette méthodologie comme la stratégie du projet Ad’Hoc.
Mener des projets ad hoc est un bon moyen de faire bouger les lignes de l’organisation, pour déployer progressivement une gouvernance plus partagée, sans pour autant remettre en cause, d’un coup, l’ensemble du fonctionnement d’une organisation.
Article co-rédigé avec Damien Leprêtre – Facilitateur et Associé
Envie d’en savoir plus sur notre fonctionnement interne basé sur le modèle de la gouvernance partagée ? N’hésitez pas à nous contacter !