Entreprise à mission : redorer son blason ou vraie quête de sens ?

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Si l’on additionne : développement durable, entreprise équitable, raison d’être, engagement, avenir, transformation, environnement et vision partagée…et nouvelles formes de sociétés à but lucratif, on obtient ?

« Les entreprises à mission ».

Un terme reconnu juridiquement qui désigne les entreprises à but lucratif s’impliquant dans des missions sociétales et environnementales.

Ces entreprises seraient-elles les mieux placées pour accomplir les missions de demain ?

Entreprise à mission : histoire et définition

Avant de définir ce qu’est une « entreprise à mission », revenons juste sur la définition d’une entreprise selon le Code civil (article 1832) : « La société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d’affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l’économie qui pourra en résulter. »

Comme vous pouvez le lire, cette définition de l’entreprise ne prend en compte que l’aspect pécuniaire sans se soucier de la société et de l’environnement.

Depuis l’épidémie du Covid19, de plus en plus de Français pensent qu’une entreprise doit avoir une utilité sociétale et des missions environnementales.

Du côté des entreprises, depuis quelques années, certaines d’entre elles veulent intégrer dans leurs différentes activités des actions en faveur des enjeux sociaux et environnementaux qui sont de plus en plus nombreux aujourd’hui. Ces dernières ne veulent pas seulement réaliser des profits, mais avoir une contribution pour la société et pour la planète.

Les pouvoirs publics ont constaté que le droit français n’abordait jamais la notion d’utilité sociale.

Le terme d’« entreprise à mission » a été introduit la première fois en France en 2015 par Kevin Levillain, chercheur à MINES ParisTech, pour traduire un terme existant depuis 10 ans aux États-Unis « Benefit Corporations ».

Le statut « entreprise à mission » est assez générique. Qu’il soit utilisé outre-Atlantique ou ici en France, une société à mission regroupe trois caractéristiques communes :

  1. Définir une mission sociale, sociétale ou environnementale positive et l’inscrire dans les statuts de la société et sur un document officiel.
  2. S’engager à respecter la mission en impliquant chacune des parties prenantes et en déployant les moyens nécessaires à la réalisation de cette dernière.
  3. Évaluer la mission avec des objectifs chiffrés et évalués chaque année et mettre en place une gouvernance en interne adaptée pour en assurer le contrôle et le bon fonctionnement (un comité ad hoc par exemple composé au moins d’un salarié) et en externe par un organisme indépendant.
Quelles sont les trois caractéristiques communes d

(Source)

Que dit la loi PACTE ?

En 2019, il y a tout juste un an, le droit français ne reconnaissait pas encore le statut juridique d’entreprise à mission.

Pour permettre aux entreprises d’aller plus loin dans leur plan de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) non reconnu juridiquement, la loi pour un Plan d’Action Pour la Croissance et la Transformation des Entreprises, dite loi PACTE, a été promulguée le 22 mai 2019.

Cette loi PACTE a créé le statut officiel d’entreprise à mission. Elle permet à chaque entreprise (SAS, SARL, etc.) d’introduire de nouvelles dispositions réglementaires relatives à la question de la mission de l’entreprise et à repenser la place de sa structure dans la société.

L’article 169 propose une modification de la définition de l’objet social de l’entreprise dans le Code civil pour offrir la possibilité aux entreprises volontaires de se doter d’une raison d’être et de répondre à une véritable mission sociétale et environnementale tout en poursuivant son activité principale.

1° L’article 1833 est complété par un alinéa ainsi rédigé : « La société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité. » ;

2° L’article 1835 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les statuts peuvent préciser une raison d’être, constituée des principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité. » ;

Attention, si vous souhaitez devenir une entreprise “engagée”, l’ensemble de vos objectifs sociaux ou environnementaux seront inscrits dans les statuts de votre société. Il ne s’agit pas d’une simple promesse ou d’un énième argument marketing. Il s’avère être un véritable engagement de la part de votre entreprise tout comme réaliser des profits.

Par exemple, en se dotant d’une raison d’être, l’entreprise précise son utilité dans la société. Pionniers sur ce point, Carrefour a déjà modifié ses statuts dans ce sens. L’enseigne alimentaire s’engage à assurer « la transition alimentaire ».

Quels sont les 5 critères pour devenir une entreprise à mission ?

(Source)

Société à mission : un avantage compétitif pour demain ?

La réponse est oui.

Oui les sociétés à mission auront un avantage compétitif certain par rapport à leurs concurrents sur le plan de l’image, de la notoriété et de l’engagement.

L’avantage de répondre aujourd’hui aux défis de demain.

Mais il y a de nombreux autres intérêts comme :

  • Définir et affirmer une véritable raison d’être auprès de toutes les parties prenantes et en impliquant ces dernières par des méthodes d’intelligence collective et de co-construction ;
  • Crédibiliser ses engagements RSE maintenant à valeur juridique dans une stratégie globale et à long terme ;
  • Motiver son équipe autour d’enjeux ambitieux et fédérateurs ;
  • Améliorer sa performance économique : des sociétés plus attractives pour les salariés comme pour les clients : Les collaborateurs seront plus enclins à rejoindre une société avec une marque employeur forte qui place les enjeux environnementaux et sociaux au cœur de son activité. Le taux d’absentéisme sera largement revu à la baisse. D’un autre côté, les consommateurs ont de plus en plus d’attentes sur ces sujets, ils seront plus attirés par les produits ou services de ces entreprises ;
  • Et bien d’autres.

Cas concret d’une entreprise à mission

Prenons comme exemple l’entreprise à mission Faguo. Sa raison d’être : accompagner ses collaborateurs et clients dans la réduction de leur empreinte carbone.

Depuis dix ans, la marque de mode réalise son bilan carbone tous les 3 ans et cherche à le réduire de plus en plus. C’est depuis début 2020 que la marque a pu inscrire dans ses statuts sa volonté de réduire son empreinte carbone. Cette mission est officiellement reconnue juridiquement.

Une approche et un mode de vie qui plaît aux consommateurs puisque son chiffre d’affaires a augmenté de 25% l’année dernière tout en réalisant une prouesse écologique : fabriquer ses produits avec plus de 70% de matières recyclées.

« Ce statut d’entreprise à mission confirme notre réalité quotidienne, confirme Nicolas Rohr, cofondateur de Faguo. Mais pour les entreprises qui veulent être rentables, il n’y avait pas de mécanisme adéquat. »

Les employés de la marque sont également concernés par cet objectif, chaque année, lors d’une évaluation annuelle, il est demandé à chaque collaborateur les actions mises en place pour réduire leur propre empreinte carbone.

(Source : Faguo, entreprise à mission)

3 témoignages de dirigeant en faveur de l’entreprise à mission

« Rendre hommage et officialiser des valeurs » – Bris Rocher, PDG du groupe Rocher

“Devenir une entreprise à mission est une manière de rendre hommage aux valeurs qui ont guidé mon grand-père lors de la création d’Yves Rocher, il y a 60 ans. La loi Pacte nous permet d’officialiser cela et de pouvoir assurer la transmission de cette valeur familiale aux générations futures qui géreront l’entreprise, dans la lignée de mon action pour réintégrer le capital de l’entreprise au sein de la famille Rocher. Notre mission – Reconnecter ses communautés à la nature – est une réponse à l’un des plus grands défis de notre société, mais aussi aux attentes de nos consommateurs. C’est également une incitation, pour les autres entreprises, à prendre le même chemin, autour de leurs propres valeurs. Je suis convaincu que la pérennité d’une entreprise se construit en conjuguant la performance économique et le bien commun. Ce nouvel outil va nous permettre de créer de la valeur autour de nos parties prenantes. Cela passera notamment par de nouveaux axes stratégiques pour chacune de nos 10 marques (Yves Rocher, Petit Bateau, Dr Pierre Ricaud…) et la certification B Corp.”

« Ancrer la raison d’être auprès des investisseurs » – Pierre Dubuc – Co-fondateur & PDG d’OpenClassrooms

“OpenClassrooms a une mission depuis sa création en 1999 : rendre l’éducation accessible, partout, tout le temps. Nous l’avons formalisée (notre raison d’être, ndlr) il y a sept ans puis inscrite dans les statuts en 2018 à l’occasion de la loi Pacte. Nous étions alors à une période charnière de notre développement : chaque année, nous doublons de taille. Nous avons donc besoin d’être très clairs sur la mission de l’entreprise, à la base de sa création de valeur. Cela nous guide dans nos décisions stratégiques. Ainsi, quand des entreprises ont voulu des formations exclusives, ce qui était contraire à notre mission d’accessibilité, nous avons refusé. Quand nous avons cherché des fonds externes, nous voulions être sûrs que les investisseurs soient bien alignés sur celle-ci et la respecte pleinement. Nous l’avons donc intégré dans le pacte actionnaires que nous avons signé avec un fonds américain. Ils n’ont pas changé une ligne. Aujourd’hui, nous consolidons notre démarche avec un comité d’impact, pour avoir une mesure et un contrôle externe. Notre mission est au cœur de notre stratégie, des produits au recrutement en passant par notre financement.”

« Assumer le rôle politique de l’entreprise » – Pascal Demurger – DG de MAIF

“L’entreprise a un rôle politique à la fois face à des enjeux de fracture sociale, d’urgence climatique et de rupture digitale, mais aussi face aux attentes des consommateurs-citoyens qui s’amplifient et à des États qui ne peuvent plus répondre seuls à cela. En tant que dirigeant d’entreprise, je ne peux pas m’en abstraire et l’idée est en quelque sorte de passer du côté du problème à la solution. Pour la Maif, prendre le chemin de l’entreprise à mission, c’est prendre ses responsabilités en tant qu’”assureur militant” pour garantir un impact positif de notre activité pour la société. C’est aller au bout de nos convictions, en embarquant l’ensemble du corps social et en premier lieu nos collaborateurs que nous avons engagés dans cette démarche. C’est aussi une façon de le déclarer publiquement, c’est-à-dire nous obliger, de manière irréversible. C’est enfin un positionnement stratégique, car nous sommes convaincus que notre engagement est un facteur d’attractivité, de différenciation et même une condition de performance, voire de pérennité.”

(Source)

Bien plus qu’un simple argument marketing, l’inscription dans ses statuts d’une mission environnementale, sociale ou encore sociétale impacte bien plus fortement l’entreprise à mission à respecter ses engagements, car la loi lui impose un double contrôle : en interne et en externe.

Plus fort que la définition d’une raison d’être, une société à mission a un rôle à jouer dans le monde actuel en utilisant ses performances économiques pour servir une mission durable et solidaire.

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