Équipes autogérées : une utopie ?

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Ce concept est revenu sur le devant de la scène depuis quelques années en réponse au besoin croissant d’autonomie au travail pour les collaborateurs d’un côté et d’attractivité et de performance pour les entreprises de l’autre.

1. Sur le papier, ça se passe comment ?

Le concept des équipes de travail autogérées n’est pas nouveau, loin de là ! Éric Trist, un londonien fondateur du Tavistock Institute for Social Research a théorisé ce concept dans les années 50 via une étude majeure réalisée dans le secteur minier. Son étude a montré que dans un contexte où les résultats en matière de productivité étaient en chute libre suite à une nationalisation ; des équipes se sont mises à développer de manière spontanée de nouvelles méthodes de travail qui se sont montrées beaucoup plus efficaces. Sur la base des premiers travaux de Trist sur le sujet, Tuckman et Jensen ont théorisé l’évolution des équipes autogérées en quatre phases :

  • Forming. La phase correspondant à la création de l’équipe, où chacun cherche sa place.
  • Storming. La phase de tension et de confrontation dans l’équipe.
  • Norming. Le temps où les modes de fonctionnement se stabilisent, des normes s’établissent et une cohésion forte s’établit.
  • Performing. Cela correspond au moment où l’équipe fonctionne de manière efficiente avec un fonctionnement très fluide.

Certes, le principe des équipes autogérées en lui-même n’est pas difficile à saisir. Cependant, lorsque l’on s’interroge sur le fonctionnement quotidien de ces équipes, cela suscite davantage de questions. Qui est responsable en cas d’échec ? Qui prend les décisions ? Est-ce qu’il y a une hiérarchie interne ? Autant de questions que nous avons creusé pour vous !

Lors de la mise en place d’équipes autogérées, l’important est de permettre à tout le monde de s’exprimer et d’utiliser en équipe les points forts et l’énergie de chacun. Tout le monde est responsable et doit pouvoir se faire confiance.

Tout le monde a sa propre vision de l’autogestion. Il est important de bien en discuter afin que les personnes se comprennent et passent des accords. Il faut le faire ensemble, régler les choses ensemble et diriger ensemble.

La théorie, c’est bien beau, mais est-ce que ça marche vraiment ?

2. Et en pratique : l’exemple de Buurtzorg !

Dans les années 90, une réforme importante de la sécurité sociale a eu lieu en Hollande. Cette dernière a conduit à des bouleversements majeurs dans un secteur où autonomie et hiérarchie plate étaient la norme. Les personnels infirmiers se sont retrouvés regroupés dans des structures de soins à domicile. Ces structures se sont développées sur une rationalisation à outrance de l’ensemble de leurs processus. Cette réforme a conduit à une perte d’autonomie des infirmiers, lesquels ont souvent perdu toute influence sur la gestion de leurs emplois du temps ; sont devenus spécialisés sur certains types d’interventions ; ont vu leur temps d’intervention minuté (3 minutes pour une piqûre, deux pour un pansement …), et ont souvent dû endosser un rôle de commercial pour promouvoir des médicaments auprès de leurs patients …

Cette situation conduisait à déshumaniser une profession qui est humaine par essence. Ni les infirmiers ni les patients n’étaient satisfaits de ce nouveau système d’organisation.

En réponse à cette mutation profonde du secteur, Jos de Blok, qui occupe alors un poste de direction au sein d’un centre de soins, décide de démissionner et de créer Buurtzorg en 2006. Son but ? Rendre les patients et les collaborateurs le plus autonomes possible. Aujourd’hui, ce sont plus de 10 000 infirmiers et infirmières qui ont quitté les structures classiques pour rejoindre Buurtzorg.

L’organisation du travail sur laquelle se construit l’entreprise est peu commune à bien des titres. Les 10 000 collaborateurs sont organisés en équipes autogérées constituées au maximum de 12 personnes. Les équipes se constituent sur des zones géographiques.

Concernant les fonctions supports, seule une cinquantaine de collaborateurs travaillent depuis le siège social de l’association. Il y a également une vingtaine de coachs qui sont des ressources disponibles pour apporter un rôle de conseil, mais ne sont jamais décisionnaires auprès d’une équipe. Les coachs accompagnent les équipes pour les aider à développer leur modèle de self-management et résoudre les éventuels conflits internes.

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Les équipes gèrent en autonomie leur planning, leur recrutement, la recherche de nouveaux clients et bien évidemment les soins aux patients. En ce qui concerne l’organisation interne d’une équipe, il n’y a pas de modèle hiérarchique. Des rôles existent et ce sont très sensiblement les mêmes d’une équipe à l’autre. Les rôles sont répartis en fonction des appétences de chacun et relèvent de choix collectifs. En ce qui concerne la rotation des postes, les équipes sont libres et globalement la rotation observée est de deux fois par an.

  • « The main role » : il correspond au cœur de métiers des infirmiers.
  • « The team player » : c’est le garant de la dynamique collective dans une équipe. Il s’assure que la communication interne est fluide et que les décisions prises sont alignées avec la vision globale portée par Buurtzorg.
  • « The housekeeper » : ce rôle correspond à des fonctions d’intendance et de trésorerie : établir les budgets, suivre les dépenses …
  • « The informer » : la personne qui occupe ce rôle est en charge de la tenue des indicateurs clés de performance de l’équipe. Elle publie notamment des rapports sur le travail effectué et la valeur produite.
  • « The planner » : comme son nom l’indique, c’est le rôle qui consiste à établir la planification des emplois du temps des membres de l’équipe en respectant les contraintes clients et en prenant ses décisions avec l’aval des autres membres de l’équipe.
  • « The mentor » : ce rôle consiste à s’occuper de l’onboarding des nouveaux venus dans l’équipe, mais aussi à faire office de coach pour résoudre les conflits internes qui peuvent parfois émerger au sein d’une équipe. En complément de ces rôles, il existe différents niveaux d’expériences qui sont fonction des compétences et qui permettent une organisation plus efficiente au sein de l’équipe. Le salaire diffère également en fonction de ce niveau.

Ces rôles sont caractéristiques du mode d’organisation de Buurtzorg.

3. La communication : un maillon clé vers l’autonomie et la responsabilisation

Avant de se lancer dans la création de sa propre structure et avant d’arriver à ce fonctionnement en équipes autogérées, Jos de Blok et ses premiers collaborateurs ont commencé par définir leur raison d’être : « aider les personnes malades ou âgées à vivre une vie plus autonome et qui vaille davantage la peine d’être vécue ». Pour mettre en place cette dernière de manière opérationnelle, ils ont ensuite posé un cadre de fonctionnement type des équipes. Des équipes auto-organisées ne peuvent fonctionner dans la durée qu’au sein d’un cadre défini.

Ensuite, l’organisation est vivante et évolue donc en permanence : le partage de bonnes pratiques et l’agilité décisionnelle sont des clés de succès de Buurtzorg.

Pour faciliter la transmission permanente de bonnes pratiques, une plateforme collaborative digitale a été créée : le « Buurtzorg Web ». Ce réseau permet une entraide forte entre les collaborateurs, permet de bénéficier de partages d’expériences d’autres équipes et aussi de se former sur de nouvelles compétences.

Nous espérons que cet article vous aura permis d’appréhender le fonctionnement des équipes autogérées et de voir que c’est possible. Même pour une structure qui emploie plus de 10 000 collaborateurs !

Pour ceux qui auraient envie d’aller plus loin dans leur exploration du sujet, nous pouvons vous conseiller de vous rendre sur le site de Buurtzorg ou de vous plonger dans la lecture de Reinventing Organizations qui va plus loin dans l’exploration de cette thématique du self-management.

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